Samedi 30 novembre
2013.
Le départ de la transat.
Derniers préparatifs, derniers
contrôles.
Le plein d’eau douce est complété
ainsi que celui du gasoil, le pain frais est acheté, DIONYSOS est prêt à
prendre la mer.
Nous passerons le dernier repas
de midi au Cap Vert avec Loulou, Françoise et ses deux équipiers de transat à
notre cantine préférée, le bar Boavista.
Les aurevoirs sont rapides,
chacun est déjà dans son voyage, chacun est impatient de prendre la mer,
l’escale Capverdienne a assez durée, maintenant il faut y aller.
15 heures, les amarres sont
larguées, la sortie de la baie se fait en compagnie de SKREO, le FEELING 10.90
de Loulou et Françoise qui se dirigent vers la Guadeloupe.
Leur site : http://labaladedeskreo.blogs.stw.fr/
A son habitude, le vent est
accéléré entre les iles de Sao Vicente et Sao Antaao. Nous franchissons le
canal de Sao Vicente sous grand voile haute et génois.
Cap au 280°, vers l’ouest.
Puis le vent molli pour tomber carrément en début de nuit. Le
moteur prendra le relais toute la nuit qui sera très calme.
Nous instaurons les quarts de
nuit pour assurer une veille permanente durant ces premiers miles, car nous sommes
encore susceptibles de trouver des bateaux de pêche, cargos ou autres voiliers
prêt de ces côtes Capverdiennes.
Dimanche 01 décembre 2013.
Nuit calme, pas de bateau pouvant
nous inquiéter.
SKREO est toujours à nos côtés,
soit devant, soit derrière, soit sur notre bâbord ou tribord.
Toute la journée du dimanche nous
serons en contact visuel avec lui.
Le vent est calme, mais nous
pouvons avancer à la voile.
La mer est tranquille, ce que
nous apprécions particulièrement.
Les habitudes commencent à
s’installer entre les membres de l’équipage.
La fatigue et la tension du
départ accumulées ces derniers jours retombe.
Petit à petit chacun trouve sa
place dans l’équipage et dans cet espace restreint du bateau.
Par de longues siestes dans le
cockpit ou sa cabine Pierre rattrape un manque de sommeil évident.
Rolland, comblé de faire faire
partie de cette aventure et submergé par l’émotion qui ne faisait que grandir
pendant la journée, s’épanche soudainement en remerciements et embrassades, les
larmes aux yeux.
Irène et moi récupérons aussi par
de longues siestes dans la journée.
La pêche est infructueuse ce
dimanche malgré les deux lignes mises à l’eau.
Dans la soirée, nous perdrons
SKREO de vue, puis l’AIS et la radio resteront muets à nos appels.
Bon voyage Loulou, Françoise,
Christophe et François, nous nous retrouverons peut être en mer, surement de
l’autre côté pour d’autres bons moments à passer en votre compagnie.
A la tombée de la nuit le vent
tombe totalement et le moteur est à nouveau mis en route jusqu’au matin. Mer
plate avec une grande houle tranquille.
Vers 3 heures du matin nous
croiserons un cargo faisant route inverse, puis un voilier englué par le manque
de vent. Un autre voilier certainement au moteur vu la vitesse annoncée par son
AIS nous passera sur l’arrière à 2 miles.
Décidément, la nuit il y a du
monde sur cette partie de l’océan.
Point à 15 heures : 109.4 nm en 24h
lundi 2 décembre 2013
Pas de vent, mer totalement
plate, une grande houle d’Est anime toutefois cette immensité.
Petit déjeuner dans le Cockpit. Toilette
par immersion totale au dessus de 5000 mètres d’eau. Une risée sur l’horizon et
soudain Eole se met à souffler. 10 nœuds de nord, nous seront vent de travers,
DIONYSOS se remet à vivre sous grand voile et genneker, 6.5 nœuds au loch.
Nous rattraperons certainement
les moments de pétole et de moteur.
A 17 heures Pierre réveille
l’équipage qui faisait la sieste, les deux lignes mises à l’eau dans la matinée
viennent de signaler une prise.
La première se rompt très
rapidement, le monstre accroché à l’autre bout disparait dans les abimes, notre
rapala planté dans la mâchoire.
Après quelques minutes de combat,
Pierre remonte à bord un poisson d’un mètre (mesuré) qui ressemble fortement à
un barracuda, peut être un tazar ? Nous vérifierons en Martinique en
montrant les photos.
Les filets préparés en cocote au
four fera notre délice du repas du soir. Le reste de cet énorme poisson est
coupé en tranches qui seront préparées au court bouillon pour les repas du
lendemain.
Nuit calme, sans lune, 5 à 10
nœuds de vent du NNE, poussent DIONYSOS à 5 ou 6 nœuds vers sa destination. Cap
au 283°.
Point à 15 heures : 101.3 nm en 24h
mardi 3 décembre 2013
Au matin le vent a encore baissé,
plus que 3 à 5 nœuds, jusqu’à présent les fichiers météo sont justes. Nous
devrions reprendre du vent à partir de mercredi.
Après le petit déjeuner, nous
gréons et envoyons le spi qui redonne à DIONYSOS une vitesse de 4 nœuds, ce n’est
pas terrible, mais nous avançons.
Nous manquons vraiment de vent
dans cette première partie de la traversée. Souhaitons
toutefois qu’Eole ne se déchaine pas trop dans les jours qui viennent.
Le spi restera gréé toute la
journée, le temps n’évolue pas, et le vent reste calme.
Le soir venu nous remettons la GV
à 2 ris et le genneker à poste.
Nuit calme.
Point à 15 heures : 106.3 nm en 24h
Mercredi 4 décembre 2013.
Même type de temps, 5 à 10 nœuds
dans la journée, genneker à poste, GV à 2 ris pour ne pas perturber le genneker.
Nous avançons quand même avec une moyenne journalière de plus de 100 miles.
La vie à bord est maintenant bien
organisée. Chacun à sa tâche, la majeure partie du temps est consacrée à la
cuisine ou à dormir. La vaisselle est faite à l’eau de mer dans le grand seau à
veau, les toilettes sont aussi faites à l’eau de mer sur l’échelle de descente
arrière. Lecture et musique. Chacun prend son temps, il n’y a rien d’autre à
faire… Retour à l’état végétatif et aux besoins primaires.
Le repas du soir se terminera par
quelques cerises à l’eau de vie préparées spécialement pour cette traversée par
la mère de Marie.
Nous apprécions ces petits
instants qui nous rattachent à la terre, aux parents et aux amis.
Tous les soirs nous faisons le
point de notre avancée et le communiquons par Iridium à mon frère
Gaby, qui le pointe, le diffuse sur le blog et retransmet les nouvelles
à Chantal et Marie-Chantal, les épouses de Pierre et Rolland.
Point à 15 heures : 112 nm en 24h
Problèmes d’heures
Lorsque nous sommes partis de
France, nous étions encore à l’heure d’été, c'est-à-dire l’heure universelle
(UTC) plus 2 heures. Puis nous sommes passés à l’heure d’hiver, soit l’heure
UTC plus 1 heure. A Gibraltar nous nous sommes mis à l’heure UTC, puisque
Gibraltar est à l’heure de Londres. Au Cap-Vert, nous nous sommes mis à l’heure
capverdienne, soit l’heure UTC moins 1 heure.
Mais maintenant au fur et à
mesure que nous avançons vers l’ouest, cette heure capverdienne sur laquelle
nous avons conservé nos pendules et nos montres ne veut plus rien dire.
En horaire d’hiver, il y a 4
heures en moins en Martinique.
Ici, il y a combien ?
Si nous voulons continuer à être
en phase avec les heures de jour et de nuit, il faudra que nous changions
empiriquement l’heure de notre pendule du bord et de nos montres tout au long
de cette traversée.
Par contre, pour conserver une
cohérence et une base logique de calcul du temps, tous nos instruments et le
livre de bord sont conservé en heure UTC.
Ici, au milieu de l’océan, les
heures ne veulent plus rien dire.
Tout le monde à saisi ???
jeudi 5 décembre 2013
Même temps, même vent, 5-6 nœuds
plein arrière.
Le petit déjeuner pris, nous nous
essayons à gréer le genneker et le génois tangonné, plus la GV à 2 ris. Le
bateau roule moins sur la houle de 2 mètres qui nous arrive de travers, il est
parfaitement équilibré et sa vitesse de plus de 5 nœuds. Nous restons ainsi
jusqu’au soir ou nous reprendrons une configuration plus facile à changer si le
vent ou la houle venait à monter.
Rien ne montera, au contraire, le
vent tombe carrément durant la
nuit. Les voiles sont difficiles à régler, raguant sans cesse
sur les haubans. Nuit fraiche.
Pierre et Rolland feront le
premier quart, Irène et moi le second.
Point à 15 heures : 108 nm en 24h
vendredi 6 décembre 2013
Même temps que la veille, 5-6
nœuds plein arrière. Les voiles restent moles, la vitesse désespérément basse,
pour la première fois, nous aurons fait moins de 100 miles en 24 heures.
Vers 10 heures 30 une baleine,
sans doute un petit rorqual est venu nous accompagner pendant quelques
instants, passant même à quelques mètres de l’étrave de DIONYSOS pour disparaitre
définitivement dans les profondeurs de l’océan, retournant nonchalamment à ses
occupations journalières de baleine de l’Atlantique.
La vitesse du bateau est vraiment
très basse, par manque de vent l’éolienne ne peut fournir l’énergie électrique
dont nous avons besoin, nous devons mettre le moteur en fonctionnement pour
refaire le plein des batteries.
Nuit calme sous génois tangonné
et genneker.
Point à 15 heures : 87 nm en 24h
samedi 7 décembre 2013
Le jour se lève sur une autre
belle journée. Ciel voilé.
Le vent est légèrement monté,
nous gréons le spi qui nous propulse à près de 5 nœuds. Il y a longtemps que
nous n’avons pas atteint une telle vitesse, le moral de l’équipage s’en
ressent.
Aujourd’hui nous avons réalisé le
1/3 du parcours. Nous parions sur notre date d’arrivée. L’enjeu : celui
qui en sera le plus proche se verra offrir le restaurant à l’arrivée.
Le Spi restera à poste toute la
journée, à la tombée de la nuit nous hisserons le genneker et la grand voile à
2 ris pour une nuit tranquille.
Point à 15 heures : 99.8 nm en 24h
dimanche 8 décembre 2013
La nuit sera effectivement
tranquille puisque la pétole s’installe à nouveau. Plus de vent, nous rentrons
la GV qui bat dans la houle, et le genneker qui se dégonfle et se regonfle
violement à chaque vague. Nous restons sous génois seul, à moins de 2 nœuds
affichés. C’est déprimant, en plein milieu de l’océan, pas un souffle d’air. Au
petit matin nous verrons les feux de 2 voiliers certainement au moteur. Ils
nous dépasseront à bonne distance, un par notre tribord, l’autre sur notre
bâbord.
Nous restons englués avec cette grande
houle de nord-est qui nous ballotte en permanence, transformant DIONYSOS en
métronome géant.
Les fichiers Grib pris à 10 h30
par Iridium sur le site de Navimail, prévoient un peu de vent à compter de ce
soir, 20 nœuds à partir de mardi et mercredi.
Souhaitons qu’ils ne se trompent
pas, mais que les fureurs d’Eole conjugués à celles de Poséidon nous épargnent
et nous laissent tranquillement franchir les miles qui nous séparent des lagons
et leurs cocotiers.
Point à 15 heures : 72.6 nm en 24h
lundi 9 décembre 2013
Le vent est effectivement monté
durant la nuit, 8-10 nœuds de nord-ouest, accompagné de grains de pluie
violente. DIONYSOS se comporte toujours aussi bien affrontant la houle qui
s’est levée, elle aussi de nord-ouest.
Au matin le vent est encore
monté, 10-15 nœuds, nous réduisons à 2 ris le
génois reste entièrement déroulé. La vitesse est encore honorable, 6
nœuds.
La houle traversière secoue le
bateau et les déplacements sont redevenus difficiles. Chaque pas doit être
calculé, les mains en permanence accrochées aux poignées.
Et puis, dans la journée le vent
retombe.
Un bateau se présente à l’horizon
sur notre arrière, toutes voiles dehors, il mettra une bonne partie de la
journée pour nous dépasser à moins de 2 miles, nos routes sont similaires. Un contact
en anglais nous apprendra qu’il vient des Canaries et se dirige lui aussi vers
les Antilles. Nous le perdrons bientôt de vue dans cette mer formée.
Ballotée durant toute la journée,
Irène qui ne se sentait pas bien durant l’après midi ne pourra retenir ses
vomissements à l’heure du repas du soir, pourtant léger puisque composé d’une
seule soupe de légumes.
La houle reste forte une bonne
partie de la nuit pour s’aplatir sur le matin avec le vent qui tombera à moins
de 3 nœuds. Le sommeil de l’équipage sera léger et entrecoupé, les corps
allongés sur les couchettes devront se caler entre oreillers et sacs à voiles
pour ne pas être ballotés.
Point à 15 heures : 81.4 nm en 24h
mardi 10 décembre 2013
Belle journée en perspective. Le
vent est monté à 10 nœuds, la mer commence à se former. Nous gréons le genneker
et remettons la grand voile haute. DIONYSOS repart à 6 nœuds.
A 11 heures, nous franchissons
les 1000 miles
faits.
Coincoin continue seul son voyage
Comme nous lui avions promis,
nous relâchons COINCOIN au juste milieu de notre traversée, lui rendant sa
liberté et le laissant poursuivre seul son voyage sur l’océan. Nous lui
souhaitons bonne chance. Que les vents et courants le mènent vers de lointains
rivages où il fera, nous l’espérons, la joie d’un enfant d’un pays du bord de
mer. Nous espérons que la missive que nous lui avons confiée sera comprise et
qu’une réponse lointaine nous sera faite.
Pour ces deux occasions nous
ouvrons un bocal de foie gras préparé depuis longtemps avec l’aide de Jérôme et
Marie, accompagné d’une bouteille de vin de Gaillac, cuvée Harmonie, cela
s’imposait.
Et puis le vent c’est enfin levé
comme le prévoyaient les fichiers météo.
Un vent de secteur nord-est,
15-20 nœuds, se renforçant durant la nuit à 20-25 nœuds.
Nous rentrons le genneker pour
remettre le génois à 2 ris et la grand voile à 3.
La mer commence à monter, la
houle, se lève aussi rapidement.
L’air est tiède.
Nous touchons les alizés par 16°
de latitude nord.
Des alizés puissants qui nous
propulsent vers notre destination à plus de 6 nœuds.
Point à 15 heures : 93 nm en 24h
mercredi 11 décembre 2013
Toute la nuit DIONYSOS a
couru dans le vent des alizés, balloté par cette grande houle de 2 mètres à 2.5 mètres arrivant du
travers arrière.
Le pilote tient bien son rôle,
mais l’inconfort de l’équipage est maintenant permanent, pas un moment de répit.
La seule position pouvant
paraître confortable est allongé sur la couchette, bien calé par des oreillers
ou par les sacs à spi. Dormir et lire redeviennent la principale activité.
Par iridium, Pierre envoie un
message à son épouse Chantal dont c’est l’anniversaire aujourd’hui. Il avait
préparé et peaufiné ce message depuis plusieurs jours, attendant le 11 décembre
pour l’envoyer du milieu de l’océan.
Bon anniversaire Chantal, avec un
peu de retard lorsque tu liras ce blog.
Le spectacle de cette grosse mer
est toujours un spectacle fascinant, fait de crainte et d’admiration pour cette
puissance qui n’est pas d’échelle humaine.
Ici l’homme et son bateau ne sont
rien, n’existent pas, n’existent plus.
Seul un sillon, une trace dans la
mer peu prouver son passage, mais ce sillon se referme très vite et plus rien
ne subsiste.
Le temps même à perdu sa
signification.
Mais vagues après vagues, miles
après miles, jours après jours, le chemin parcouru s’étire et le but fixé sera
bientôt en vue grâce à la pugnacité de l’équipage qui mène le bateau.
Un frêle héron pique-bœuf est
venu se poser quelques instants sur le pont instable de DIONYSOS, sans doute
pris par les vents qui l’ont emmené loin de ses côtes, de ses bovins et des
bestioles dont il se nourri. Sans doute trouvant DIONYSOS trop lent à son gout,
il reprit son envol pour s’éloigner à grands coups d’ailes vers l’ouest et les
iles des Antilles.
Si loin des côtes, son avenir
semble bien compromis…Bonne chance à lui.
Dans la soirée le vent monte
régulièrement jusqu’à atteindre 25-30 nœuds. La houle a immédiatement suivie,
rendant DIONYSOS des plus inconfortables.
Grand voile à 3 ris, génois
enroulé à 2, le bateau file à plus de 6 nœuds.
Point à 15 heures : 132 nm en 24h
jeudi 12 décembre 2013
Toute la nuit le vent a soufflé à
25-30 nœuds, la mer est forte, l’équipage n’a pas pu se reposer
confortablement.
La nuit sera agitée, et les
changements d’amures fréquents.
Le jour se lève sur une mer
forte, le déferlement des vagues sur notre arrière est maintenant permanent, certaines
d’entre elles s’écrasent avec fracas sur la poupe dans un bruit impressionnant.
DIONYSOS court toujours dans les vagues et l’alizé. Parfois une vague arrivant
sur son arrière déferle avec force, envahissant le cockpit pour quelques
instants. Tous les hublots sont fermés, la descente au carré est remise bien en
place pour éviter qu’une de ces vagues mal éduquées ne s’invitent dans le carré
sans y être invitées.
Profitant d’un moment
d’inattention et du capot laissé ouvert quelques instants, une vague plus haute
que les autres claque sur la poupe, envahit le cockpit, et rentre en cataracte
par la descente et le hublot de la cabine de Pierre resté ouvert.
Nous passerons une bonne partie
de l’après midi à vider les fonds de cette eau de mer et faire sécher matelas
et linge.
La descente et son capot ainsi
que tous les hublots resteront maintenant fermés. A l’intérieur la chaleur
montera sous le manque d’aération.
Un temps bousculé, une folle embardée,
et DIONYSOS reprend immédiatement sa route, il garde vaillamment son cap vers
sa destination. Notre confiance envers lui ne fait que croitre, c’est un bon
bateau sûr et marin passant parfaitement dans cette mer difficile.
Ces conditions dureront toute la
journée, la houle atteignant parfois 4-5 mètres, les vagues qui déferlent sont
encapuchonnées d’écume, juste en dessous l’eau est couleur menthe glaciale.
C’est magnifique et grandiose.
Les fichiers météo prévoient ce
type de temps jusqu’à la fin de la semaine, peut-être plus.
Point à 15 heures : 143 nm en 24h
Croisière dans les alizés :
Tous les prospectus, catalogues
et récits relatent de tranquilles traversées transatlantiques, sous le soleil,
rafraichies par un doux alizé d’est, toutes voiles dehors, spi bien gonflé à
poste, de véritables croisières de vacances pour jeunes mariés. La jeune femme
en petite tenue prenant nonchalamment le soleil sur la plage avant du bateau
parfaitement rangé. A la barre le skipper chemise ouverte sur un corps bien
bronzé, menant cet équipage vers les eaux bleues turquoise des lagons Antillais.
Et bien nous, ce n’est pas la
traversée que nous vivons et avons vécu.
Preuve qu’elles ne sont pas
toutes identiques et idylliques, ou qu’alors on ne nous avait pas tout dit.
Tout d’abord en début de
traversée, pas de vent, ou très peu pendant une semaine, nous obligeant sans
cesse à manipuler et régler les voiles, toujours ballotés par une houle venue de dieu sait où…
Puis maintenant du vent force 6-7
beaufort, qui transforme DIONYSOS en machine à laver mode essorage 24 heures
sur 24. A
en croire la météo, ce mode de programmation devrait durer jusqu’à l’arrivée.
Fatigue des corps, fatigue des
esprits, fatigue du matériel.
La moindre activité est
éprouvante.
Les repas sont pris debout,
appuyés au frigo ou à l’évier, dans les bols ou les moques, car rien ne tient plus
sur la table du carré.
Se laver ou simplement assouvir
des besoins naturels dans le petit cabinet de toilette est une épreuve
physique.
Réaliser les tâches quotidiennes,
et même dormir sont des défis aux lois de la gravité sans cesse changeantes
dans cet espace en mouvement permanent.
Une traversée transatlantique
n’est pas chose banale. Même si certains l’ont réalisé à ces âges plus qu’avancés,
avec des bateaux moins biens équipés que DIONYSOS, à la rame ou par des moyens
non conventionnels.
Une traversée de l’Atlantique se
prépare, rien n’est joué d’avance, surtout pas les conditions météo qui changeront immanquablement durant
les 15 à 20 jours qu’elle durera.
Mais après toutes ces
difficultés, ces souffrances, quelle récompense que de se retrouver sous le
vent de la Martinique ou d’une de ces iles des Antilles, à l’ancre, dans un
lagon aux eaux turquoises, ballotés mollement par le doux vent rafraichissant,
sirotant dans un verre embué un tee punch tintant de glaçons. Comme sur les
magasines…
Quelle récompense en perspective,
nous en rêvons tous à mesure que l’arrivée se précise.
Quelle récompense de pouvoir dire
enfin :
Nous l’avons fait.
Je l’ai fait.
Nous pouvons en être fiers.
vendredi 13 décembre 2013
Même temps que la veille, vent
20-25 nœuds d’Est, mer forte, houle 4 à 5 mètres.
Nous commençons à nous habituer à
ce traitement fort inconfortable.
Plus question de lire à
l’intérieur, la fatigue et le manque de sommeil se font sentir.
Durant la nuit, vers 1 heure du
matin, nous croisons à moins d’un mile la route du voilier Scolopax. Nous l’avions
remarqué à Mindelo accosté au quai principal de la marina.
Curieuse coïncidence que de
croiser si prêt la route de ce bateau parti un jour après nous, qui avait fait
du sud jusqu’au 12ème parallèle et le retrouver par 16° de latitude
nord en route pour Saint Martin. L’océan est grand, mais les rencontres sont indubitablement
possibles.
Le bimini et la capote sont
retirés et rangés, il ne faudrait pas qu’une lame les détruise.
Point à 15 heures : 152 nm en 24h
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