samedi 14 décembre 2013
La mer a été très agitée toute la
nuit, la houle de plus de 4 à 5
mètres déferlent en permanence autour de DIONYSOS.
Le soleil se lève sur une matinée
maussade, de gros nuages barrent l’horizon, annonciateurs de grains qui
effectivement nous atteindront. La pluie est alors abondante, le vent monte
furieusement atteignant les 30 nœuds, la mer s’agite rapidement.
Nous avons essayé à plusieurs reprises la configuration que nous
avait suggérée Fred, mais le vent est trop fort, la houle trop haute, le génois
déventé en permanence claque à chaque embardée et secoue furieusement le
gréement.
Nous conservons la voilure à 3
ris dans la grand voile, le génois est roulé entièrement, le vent plein
arrière, la houle sous 30°. DIONYSOS file ses 6.5 nœuds, plus de 8 sous les
grains.
A 12 heures il nous reste 540 miles à parcourir
jusqu’à l’ilet Cabri, au sud de la Martinique, le point d’aboutissement de
notre navigation.
Encore une journée mode essorage.
A 14 heures nous sommes rattrapés
par un cargo sans AIS, il nous doublera à moins d’un mile. Il disparaitra
rapidement dans la houle et le grain que nous sommes en train de subir.
Point à 15 heures : 145 nm en 24h
dimanche 15 décembre 2013
Le vent atteint maintenant 25-30
nœuds en continue.
La mer devient vraiment grosse et
les vagues sont de plus en plus difficiles à négocier.
Le pilote automatique fait de son
mieux pour garder le cap qui lui est assigné.
Vers 1 heure, durant mon quart et
celui d’Irène une vague plus haute que les autres prend avec violence DIONYSOS
par son travers bâbord qui se retrouve travers de la houle. Cette vague
scélérate passe par-dessus le pont avec un bruit d’enfer, envahie le cockpit et
le coffre tribord, au-dessus de la cabine utilisée par Rolland.
Le bateau est repris en main,
remis sur son cap, mais nous changerons la voilure en ferlant la grand voile et
mettant le génois à 3 ris. Nous nous mettons en fuite devant ce vent qui forci
et cette mer qui est maintenant très grosse.
Nous nous apercevons que le
coulissot de la latte du 3ème ris est cassé, il n’a surement pas
supporté cette déferlante.
DIONYSOS est tout de suite
stabilisé, propulsé à plus de 6 nœuds par ce petit bout de toile. Nous prenons
un cap compatible avec la houle impressionnante qui fait maintenant de 7 à 8 mètres et nous ballote
furieusement.
Rolland de retour dans sa cabine
s’aperçoit que sa couchette est entièrement mouillée, l’eau qui est rentrée
dans le coffre, s’infiltre maintenant en fins filets au dessus de ses pieds.
Une partie de la nuit sera
consacrée à éponger et sortir tous les vêtements mouillés.
Le moral de l’équipage en a pris
un coup et le sommeil ne pourra être trouvé avant le petit matin.
Je poursuis le quart avec Pierre
jusqu’à 7 heures. Irène et Rolland prendront la suite.
Au matin le vent est toujours
aussi fort, et la houle toujours aussi forte, mais le bateau avance bien. Nous
en profitons pour rechercher d’où peut bien venir cette eau qui aurait due
rester dans le coffre. Un petit trou dans le fond est repéré, il est vite
rebouché par du mastic. Tous les fonds sont épongés et séchés. Le capot et la
descente sont en permanence fermés, transformant l’intérieur du bateau en une
véritable étuve. Chaque mouvement se transforme en un flot de transpiration.
La fatigue de l’équipage se fait
maintenant sentir, il nous tarde d’arriver, d’autant que la météo prévoit ce
genre de temps jusqu’à la fin du voyage.
Nous nous mettons à l’heure de la
Martinique, soit l’heure UTC moins 4 heures.
Point à 15 heures : 140,5 nm en 24h
lundi 16 décembre 2013
Nuit agitée, vent 25-30 nœuds
sous les grains, mer forte, houle 5 à 6 mètres, parfois des creux beaucoup plus
importants. Quelle hauteur ?
Difficile à dire…
A 5 heures du matin durant mon
quart et celui d’Irène, une vague submerge le bateau par l’arrière et se répand
dans le carré dont le capot est pourtant fermé et étanchéifié par des joints.
Tout le monde se retrouve debout,
les yeux hagards, épongeant pour la nième fois le sol du carré devenu glissant.
La voilure est encore réduite,
nous naviguons maintenant à plus de 6 nœuds, avec juste un bout de génois à
l’avant.
Toute la matinée la houle est
très forte, l’allure se ralentie, le bateau part régulièrement au lof une fois ces montagnes d’eau passées.
Le capot et la descente restent
fermés, régulièrement des vagues viennent envahir le cockpit dans un fracas
épouvantable. Nous scotchons tous les coffres avec de l’adhésif pour éviter un
remplissage lors des phases sous-marines de DIONYSOS.
Il nous reste moins de 300 miles à parcourir.
Profitant d’un petit moment de
répit et d’accalmie, nous réparons le coulissot de la grand voile cassé la
veille, on pourrait en avoir besoin.
A 18 heures nous prenons la météo
par iridium. Elle nous confirme que le vent devrait rester à 20 nœuds jusqu’à
mercredi, jour envisagé de notre arrivée.
Il y aura du vent et la houle qui
va avec. Mais maintenant nous sommes habitués et envisageons cette fin de
parcours avec sérénité. Le bateau marche bien même si le mode essorage
permanent continue.
Nous sommes sereins, jusqu’au
point fait à 19 heures avec mon frère Gaby qui nous alarme en nous disant qu’un
coup de vent était en cours sur la Martinique, que l’alerte jaune avait été
déclenchée. Pas étonnant avec ce que nous venons de subir à 300 miles des côtes.
Nous commençons à douter de nous
et des fichiers météo que nous venons de télécharger. Nous contrôlons une fois
de plus leurs concordances entre ce qui était prévu les jours et les heures précédents
et ce que nous avons subit.
Tout correspond. Nous ne voyons
pas pourquoi il en serait différent pour les jours à venir.
Nous serions nous autant trompés
sur l’interprétation des données que nous avons ?
Nous étudions ensemble sur
l’écran de télévision du carré les données de prévisions que nous possédons.
Nos interprétations semblent bonnes et semblent correspondre à la réalité.
Le repas du soir sera morose,
l’appétit absent. Le repos sera difficile pour ceux qui assureront le deuxième
quart, le doute s’installe.
La suite de la navigation nous
prouva que nos interprétations étaient bonnes.
Nous avons été inquiétés alors
qu’il n’y avait pas lieu de l’être, du moins pas plus que ce que nous vivons
depuis 1 semaine. Les conseils de prudence qui nous ont été transmis ce soir là
par Iridium nous ont plus inquiétés que rassurés.
Est-ce que nous courront des
risques que nous n’aurions pas évalués pleinement ?
De plus, que pouvons-nous faire
d’autre pour s’y soustraire ? Nous devons continuer, il n’y a pas d’autre
alternative. Le bateau est préparé pour le gros temps, tout est fermé ou
attaché, personne dehors, le cap de fuite nous mène vers notre destination, la
voilure est réduite au maximum pour garder une vitesse nous permettant de
rester manœuvrant…
Point à 15 heures : 126 nm en 24h
mardi 17 décembre 2013
La nuit a été relativement calme,
même si des grains fréquents sur la route de DIONYSOS renforcent par moment le
vent et la houle.
Au matin la mer et le vent se
sont relativement calmés, 15-20 nœuds d’Est, houle 2-3 mètres.
Repéré à l’AIS, nous ferons une
grande partie du trajet avec le voilier S/Y HAPPY DAY, il ne répondra pas à nos
appels sur la VHF.
Le soleil est de retour, le but
approche, le moral remonte.
Des grains croisent sans cesse
sur notre route, le vent monte alors à plus de 30 nœuds, avec évidement la
houle qui va avec.
Toute la journée nous restons
sous génois seul, roulé à 3 ris. Cette mer croisée dans tous les sens secoue
violement le bateau.
Nous nous préparons à passer
notre dernière nuit en mer.
Point à 15 heures : 125 nm en 24h
mercredi 18 décembre 2013
Nuit effectivement agitée, mouvementée,
ballotée, chahutée, secouée….Mais ce sera la dernière.
Une vague s’invite encore dans le
cockpit, au moment même de notre relève de quart, juste quelques secondes après
que Pierre ai eu refermée la
descente. Un fracas sur le pont, l’eau s’évacue lentement par
les évacuations prévues à cet effet, mais, cette fois, ne pénètrera pas dans le
carré.
Le vent est toujours soutenu,
20-25 nœuds d’Est, houle 3-4
mètres.
Au matin, beaucoup de poissons
volants qui fuient l’étrave comme des volées de moineaux.
Par un piquer vertigineux dans
les vagues, un fou de bassan viendra prélever son déjeuner, il en ressortira 2
poissons volants au bec.
A 9 heures locale la terre n’est
pas encore en vue, (nous nous sommes mis à l’heure des Antilles depuis
plusieurs jours).
Plein ouest, à 60 miles devant notre
étrave, l’ile de la Martinique.
Nous savons quelle est là, la
cartographie électronique nous le confirme, une masse brumeuse signale sa
présence, mais nous ne pouvons pas encore la voir.
Pierre et Rolland scrutent
l’horizon et les premiers sommets de la Martinique qui pourraient apparaitre. Son
point culminant est la
Montagne Pelée à 1397 mètres, on devrait la voir.
Le premier qui criera
« TERRE-TERRE » se verra offrir par l’équipage une rasade de rhum.
C’est Irène qui criera ces mots à
17h15 UTC à 35 miles
des côtes. Nous sommes heureux de revoir la terre après tant de temps passé en
mer.
La côte se fait plus précise sur
l’horizon, les contours et les détails apparaissent, nous pouvons maintenant
voir les routes et les véhicules les empruntant.
A 23 h 18 nous passons au sud de
l’Ilet Cabri, nous le contournons à bonne distance, pour virer sur notre
tribord vers le mouillage de la baie de Sainte Anne.
Evidement, alors que la tablette
cartographique nous dirige dans la baie constellée de hauts fonds et de cayes,
nous nous prenons dans le filet d’un casier. Quelques manœuvres avant arrière
du moteur, un coup de couteau par ci par là, et DIONYSOS peut reprendre sa
route. Nous vérifierons demain matin si des morceaux de bouts ne sont pas
restés entortillés dans l’hélice.
A 1 heure 19 nous jetons l’ancre
dans la baie encombrée de nombreux bateaux au mouillage qui sont venus se
mettre là à l’abri du coup de vent prévu pour le 19 et 20 décembre.
Séquence émotion ou tout
l’équipage s’embrasse, se félicite, se remercie. Les larmes ne sont pas loin, la
tension redescend peu à peu.
Nous sommes arrivés, nous sommes
fatigués, mais nous sommes arrivés, nous avons traversé l’océan Atlantique.
Nous prévenons tous nos parents,
amis, voisins et connaissances de notre arrivée sans encombre. Certains commençaient
à se soucier des mauvaises conditions météo que nous avons subies.
Ce soir ce sera champagne, avec
une boite de sardines et une saucisse sèche coupée en rondelle, 2 paquets de
chips, dessert mini babibel et un bocal
de pruneaux au vin de Cahors donné par ma maman il y déjà quelques temps.
Peu importe, nous n’avons plus de
produits frais ni de pain, mais ce sera un repas de fête. Fête des marins qui
ont accompli leur rêve.
C’est à plus de 2 heures du matin
heure locale maintenant que nous rejoignons nos couchettes, la pression est
tombée, nous allons pouvoir passer une nuit tranquille, sans se soucier des
quarts, du vent ou de la mer qui monte.
Nous allons pouvoir profiter des
Antilles, de la Martinique, de la mer et du soleil autrement, comme des
vacanciers.
Depuis Mindelo au cap vert, nous
avons parcouru 2143 miles
nautiques en 18 jours et 8 heures.
Et bien nous on vous dis B R A V O et F E L I C I T A T I O N !!!
RépondreSupprimerVous etes arrivez après les péripéties que l'on a lues maintenant profitez un max de votre séjour et surtout envoyez des photos pour nous faire oublier un petit peu notre temps hivernal .
Bises Jeannot / Bernard
Super de savoir que vous êtes arrivés et de nous avoir vite raconté tout ça.
RépondreSupprimerEt hop, une bonne rasade de rhum pour fêter ça.
Bises
Geneviève et Léon
Félicitations aux loups de mer...............
RépondreSupprimerNeptune a veillé sur voussssssssssssssss............. ;)
Profitez du beau temps et de la chaleur et bon séjour à vous........
Grosses bises.
Pat JM
Félicitations aux marins, et BONNES VACANCES !!
RépondreSupprimerBisous de Gilles et Hélène